L’AVENTURE MAXXIMUM (4e partie): ERICK PELEAU

La radio Maxximum aurait eu 30 ans en octobre 2019. Il y a un culte autour de cette chaîne qui était diffusée uniquement sur la FM (le web n’existait pas encore) grâce aux efforts quotidiens d’une équipe d’une trentaine de personnes installée près du Trocadéro puis au Forum des Halles dans le centre de Paris. Cette passion chez beaucoup de Français âgés entre 15 et 35 ans pour la plupart ne s’est pas estompée malgré les années, la nostalgie de ces années Maxximum est encore très vive. Nous faisons le tour des amis de la station, ceux qui l’ont produite, les gens de l’antenne et aussi les maîtres de l’ombre qui ont fait brillé un son novateur. Maxximum remplissait un rôle important dans le quotidien des habitants d’une quarantaine de régions captant le son de la radio des nouvelles musiques en ayant l’impression de vivre la révolution techno et electro sur une radio faite selon les recettes des stations commerciales américaines adaptée aux traditions radiophoniques françaises. Retrouvons l’homme de la promotion, un chef qui s’appelle Erick Peleau. Un homme de radio venu du département de la Charente-Maritime, visionnaire et très motivé, monté à Paris pour assurer des revenus aux radios régionales avant de passer à NRJ et de monter à bord du vaisseau Maxximum. Interview.

MAXXIMUM au Midem

Erick Peleau (à gauche) au stand de Maxximum du Midem à Cannes

Bonjour Erick et merci pour l’interview. Racontez-nous ce qui vous a amené à Maxximum.

Déjà en radio depuis les tous débuts, j’étais à NRJ depuis plus de 4 ans lorsque j’ai appris que la CLT se préparait à lancer un nouveau réseau FM dirigé par Eric Hauville.

Je connaissais Eric depuis plusieurs années et je suis donc entré en contact avec lui au plus vite pour poser ma candidature. Je me souviendrai toujours de sa surprise quand je lui ai dit : « J’arrive » 😉 Il n’avait pas de budget, ne savait pas où ils allaient… Bref une véritable aventure !!! Je retrouvais l’ambiance de la création des radios pirates… J’ai foncé !

Où avez-vous commencé la radio ?

J’ai commencé dans une radio locale de Charente-Maritime : Radio Saujon Littoral (RSL) à côté de Royan dans laquelle je faisais une émission sur le cinéma avec mon ami Didier.

J’étais militaire dans la Marine Nationale à Paris, ce qui ne m’empêchais pas de suivre le Cours Simon et d’être en relation permanente avec les maisons de disques.

Rose Laurens interviewer par Erick à Saujon

Erick sur un plateau RSL avec Rose Laurens.

Ainsi je ramenais les disques le week-end à la radio et rencontrais régulièrement les artistes français pour les interviews. Pour des raisons diverses, j’ai quitté RSL pour rejoindre Royan Fréquence avec une nouvelle émission « Amicalement Stars ». Une émission régulière du samedi au cours de laquelle étaient interviewés des artistes comme Laurent Voulzy, Michel Berger, Michel Drucker, Lio, etc… L’occasion de faire faire l’une des premières scènes à une jeune chanteuse : Mylène Farmer… Un excellent souvenir pour moi… Sans doute un calvaire pour elle, le Revox de sa bande était défaillant…

C’est lors de cette soirée que je rencontre le responsable de la première société d’achat d’espaces sur la FM (pub très récemment autorisée par Mitterrand). Je rejoins donc Fusion FM pour quelques mois (qui me permettent de sympathiser avec Eric Hauville alors patron du réseau leader en Normandie : RVS).

Vous avez donc un peu plus mis un pied dans le milieu de la radio ?

Il y avait un réseau à cette époque qui était naissant et qui prenait de l’ampleur, c’était NRJ. Ils m’appellent alors que je gérais de la pub de 220 radios régionales. J’ai rejoint NRJ pour aider à la gestion d’un réseau naissant et par hasard, je suis devenu pour quelques mois l’assistant de Max Guazzini puis j’ai rejoint la régie commerciale du groupe, 15/34.

J’ai passé plus de 4 ans à NRJ et je pensais y avoir fait le tour quand je lis dans la presse que RTL lance Maxximum. J’appelle Eric qui me dit “t’es fou, je sais pas quel salaire je pourrais te verser, reste où tu es.” Je lui réponds que le projet m’intéressait, je viens quand tu veux. Il a rappelé pour me dire que c’était ok.

Comment se passe cette arrivée à Maxximum ?

Aventure FM (l’ancien nom de la fréquence de Maxximum) était localisée dans le parking du Trocadéro. Je rejoins alors une bande de vrais passionnés, Jean-Noël Auxiette, il y a aussi Michel Brillié (une des icônes de la radio). Et puis je rencontre l’équipe rapprochée d’Eric avec Mickaël Bourgeois et Olivier Devriese. Pour eux, venant d’NRJ, la radio FM de référence en France mais surtout, issu des radios pirates et libres de l’origine de la FM, nous parlions le même langage. Même si par moment, le nom d’NRJ revenait trop souvent dans nos réunions de travail… Je leur disais souvent qu’il fallait trouver nos propres références et arrêter d’aller chercher celle de la panthère.

Comment est arrivé le nom de Maxximum dans ces réunions ?

De nombreuses recherches de noms ont été effectuées par des agences françaises, étrangères afin de trouver le nom communiquant et surtout libre de droit.

Maxximum avec deux X s’est affirmé et les visuels sont arrivés par la suite. Je n’en suis pas sur mais il me semble que c’est l’agence Carré Noir qui a trouvé cette identité. Mais c’est à confirmer…

On dirait que pour la vénérable maison RTL, la culture radio de Maxximum était beaucoup plus spécialisée, ouverte sur la jeunesse, non ?

Dans un panorama FM déjà très fermé et très occupé avec différents réseaux et thématiques, l’intelligence de la CLT (aujourd’hui RTL Group), c’est qu’ils ont su s’entourer de personnes issues et passionnés de radio de plusieurs générations (Michel Brillié qui a commencé avec Salut les Copains sur Europe 1… et d’autres créateurs de radios pirates de 1980). Tous créatifs et « aventuriers » pour leur faire confiance et les laisser créer « autre chose », un autre format. Pour la plupart d’entre nous, créer Maxximum était une nouvelle aventure, un nouveau challenge alors que la FM était déjà « installée » et que créer semblait très difficile… déjà ! Outre l’intelligence d’avoir rassembler plusieurs générations de passionnés, il y avait vraiment cette volonté de créer quelque chose de nouveau avec une équipe restreinte.

Je retrouvais ce que j’avais pu connaître avec les débuts de la FM, le ton qui m’avait donné envie de faire de la radio quand j’écoutais Radio 7 (la première FM de Radio France). Mickaël Bourgeois cherchait et trouvait les titres qui allaient donner le ton musical, Michel Brillié veillait à la couleur de l’antenne, Olivier Devriese chérissait le son spécifique. Tous les autres, animateurs, journalistes, programmeur, la communication et promotion… participaient à cette ambiance extraordinaire qui s’entendait sur l’antenne. Eric Hauville dirigeait l’ensemble avec talent… et quelque fois avec humeur.

Musicalement, vous étiez libres de programmer des genres peu exploités (la techno, le HI NRG, de la funk et des choses plus pop aussi) ?

La nous sommes dans le chapitre qui concerne le « Monsieur Musique : Mickaël Bourgeois. C’est lui qui cherchait partout et qui avait son propre réseau « d’informateurs » pour trouver la pépite. Et la diffuser avant les autres (qui d’ailleurs ne se gênaient pas pour reprendre ensuite… : « Maxximum, la radio que les autres radios écoutent » ! Outre la programme très novatrice, nous avions des animateurs qui avaient un véritable talent pour donner un nouveau ton autour de la musique. Certains étaient déjà animateurs, quand d’autres étaient de purs DJ. Un nouveau ton d’animation orchestrée par Michel Brillié avec un mix d’identités d’animations différentes : Pat rompu aux techniques de l’intro, Eric Madelon capable de répartis très libre et drôle, Fred Rister, très grand connaisseur des nouveaux rythmes et capable de fous rires énormes. Sans oublier les Lorenzo Pancino, Dom Dom Perrin, etc… Michel Brillié a fait la radio avec des tons différents en fonction des plages horaires, il faisait de la radio comme on compose une musique permanente, avec des alternances, un allegro, un scherzio… Plus cool, plus rapide selon les moments de la journée. Le tout ponctué par les voix suaves de nos journalistes, seules femmes à l’antenne… mais quelles voix !

Combien étiez-vous ?

En tout, nous étions une équipe d’une trentaine de personnes. Sous la direction de la communication avec Xavier Bise, il y avait ma partie : la promotion que j’assurai avec Patrick Delhaye qui nous aidait régulièrement et qui me remplacera avant la fin de Maxximum. Xavier, en tant que Directeur de la Communication, gérait la création du film, les achats d’espaces, campagnes d’affichage, etc… Mon rôle était la direction de la promotion avec « Les Soirées Maxximum » organisées mensuellement et diffusées par satellite (une première à l’époque). Nous choisissions le plus gros club dans chaque région de France, puis nous faisions venir 3 à 5 artistes. Cette soirée était animée par Pat, Fred, Joachim et nous diffusions de 1h à 3h du matin (l’heure de diffusion par satellite coûtait très cher…). Ces soirées étaient vraiment très populaires, les clubs étaient évidemment très intéressés car ce soir là… C’était plein ! Je rencontre encore certaines personnes qui se souviennent de ces soirées… avec émotion. Outre ses soirées, nous mettions en place les compilations avec certaines maisons de disque, une ligne de produits et vêtements avec la chaîne Madison (qui n’existe plus aujourd’hui), une collection vidéo, des premières cinéma…

Quel est ton meilleur souvenir ?

A Lyon, devant 2800 personnes, c’était au Xyphos, c’était gigantesque : le DJ arrivait dans une soucoupe, au-dessus de la salle. Le Xyphos, c’était la plus marquante mais il y en a eu beaucoup d’autres. Le Boy ou Queen à Paris, Toulouse, Bordeaux, Rennes.. et même le Luxembourg pour « faire plaisir »… à nos patrons de la CLT installés là-bas. Ce fut d’ailleurs un peu la galère. Les clubs ferment à deux heures du matin et pour faire une soirée qui allait au delà de 23-1h à l’antenne, il a fallu faire une demande très protocolaire aux autorités locales…

Autre anecdote, le 1er avril 1990 (je ne sais pas qui a eu l’idée de cette superbe blague), l’antenne a fait croire aux auditeurs qu’en appuyant sur un bouton de leur radio, grâce à une prouesse de nos techniciens, le son allait être modifié de manière extraordinaire. À la fin de la journée, les auditeurs appelés à réagir ont laissé des messages dingues indiquant que la différence était énorme. Nous étions aux anges en écoutant tous ces retours à l’antenne alors qu’il n’y avait en réalité aucun changement technique et donc… aucune modification du son habituel.

D’autres souvenirs moins glorieux ?

Oui hélas. Nous étions très sollicité par les associations d’étudiants pour animer leurs soirées. Nous en avons eu une qui m’a laissé un souvenir très… amer. Les Olympiades de toutes les écoles de commerce européennes, ça se passait en France. L’école de commerce française qui organisait les Olympiades était fan de Maxximum. Nous avons donc accepté d’animer leur soirée de clôture devant plusieurs centaines d’étudiants internationaux… et ce fut la plus grande baffe. Nous avons été surpris de constater que la majorité des gens présents ne dansait pas sur la musique jouée par nos DJ. Totalement par hasard, au moment où nous avons passé un titre très acide, nous avons vu une délégation allemande très remontée qui nous insultait et nous demandait d’arrêter… On nous a expliqué plus tard que le titre que nous passions (d’ailleurs excellent) avait été choisi en Allemagne comme hymne de groupes d’étudiants allemands extrémistes… Ce que nous ignorions évidemment. On a fini par passer les Beatles et autres titres plus classique… Ça a a été douloureux pour toute l’équipe. Les étudiants, tellement contents de nous avoir, étaient tellement gênés pour nous…

MAXXIMUM Club Kalimba

L’équipe de Maxximum, Olivier Devriese, Xavier Bise et Eric Hauville dans un club pour une soirée que la radio animait et diffusait par satellite.

Lors de vos campagnes de promo de la radio, avez-vous des souvenirs ?

Oui une anecdote, le jour du lancement des « Années Maxximum », un autocollant fut accroché aux antennes de voiture, comme un drapeau sur l’antenne. Vous aviez la liberté de prendre l’autocollant ou de le jeter. On était pas très en phase avec le « Merci de de ne pas jeter sur la voie publique », le slogan des « Années Maxximum commencent » visait un public jeune mais on voulait toucher un maximum de monde, alors nous avons recruté des étudiants pour diffuser les 500 000 autocollants en une nuit, celle du lancement. On est même allé devant le domicile de Jacques Rigaud, le patron de RTL et de la CLT en France, donc notre patron. Problème, le lendemain matin, on reçoit un appel du dirigeant qui nous dit « c’est bien les gars, on vous voit partout, mais sur votre message « Les années Maxximum commencent », vous avez écrit « les annes »… Normalement, le communicant auteur de la bourde est viré sur le champ. Mais là personne n’a pu accuser qui que ce soit puisque tout le monde avait validé… Cet affichage inédit a été un vrai succès… malgré la faute. C’est un autocollant collector.

Tout le monde de la radio vous prenait au sérieux ?

Oui et non… on nous écoutait, on nous regardait… on nous copiait aussi. Nous étions actifs hors antenne, bons à l’antenne et avec les moyens de la CLT… Mais on ne peut pas dire que nous faisions… peur à nos concurrents. Avec plus de fréquences, cela aurait été différent… Mais c’est une autre histoire ! Je me souviens d’ailleurs avoir revu Max Guazzini lors d’une réunion avec plusieurs radios pour préparer la « Nuit de la FM ». Dans un de ses sourires, il me dit « alors Max-xi-mum, tu fais le Mi-ni-mum… ». Nous n’étions pas (encore) une menace. Ils nous ont regardés, écoutés. Mais de loin. Aujourd’hui, je me souviens avoir senti un vrai changement, lorsqu’Eric Hauville, que le CSA sommet de choisir entre son « premier bébé » RVS, et la direction de Maxximum. Certes Eric a choisi seul, mais il aurait pu être défendu.

Ensuite la vente du réseau au groupe PRISA a été vécu comme une vraie trahison et surtout une grande injustice pour une équipe hyper motivée et des résultats qui commençaient à venir. Un arrêt trop rapide… Quand on voit le succès actuel de la programmation avant-gardiste de Maxximum. En même temps et je dois être totalement objectif, sans la CLT, je n’aurais pas pu vivre l’un des meilleurs moments de ma vie avec la création de Maxximum et la rencontre avec une équipe géniale.

Les gens d’une trentaine d’années occupant vingt ans après des postes importants dans le monde de l’entreprise ont-ils encore une nostalgie de Maxximum ?

Lors événements organisés par ma société de communication « Invité de Marques », j’ai eu l’occasion par 2 fois de rencontrer 2 clients qui ont, pour l’un suivi et assisté à plusieurs de nos soirées, et pour l’autre, avoir toutes nos compilations…

MAXXIMUM au Festival d'Avoriaz 2

Lunettes noires pour jours blancs, Olivier Devriese et Erick Pelleau à Avoriaz.

Quand êtes-vous parti de Maxximum ?

Je suis parti quelques mois avant la fermeture. Je me souviens avoir eu une discussion avec Jocelyne Buisson, notre rédactrice en chef, sur la situation que nous vivions et ce que nous sentions venir. Nous sommes allés voir Hervé Rony, le remplaçant d’Eric Hauville au poste de directeur de Maxximum, afin de lui demander comment il voyait les choses… « Ecoute Hervé, dis-nous si nous devons partir ou rester ? « Vous feriez mieux de partir…» nous dit-il. Après lui avoir demandé de conserver Patrick Delhaye à ma place, Jocelyne et moi avons démissionné… (avec beaucoup de peine).

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Une manifestation dans le quartier de RTL, rue Bayard, pour sauver Maxximum.

Que gardez-vous de Maxximum, outre des souvenirs ?

Des contacts réguliers avec les anciens, quelques objets fétiches (pins… notamment la maquette du premier pin’s, etc…) et surtout un film réalisé le jour de mon départ de Maxximum. J’ai filmé les locaux, les personnes présentes… une partie de l’ambiance… Je ne l’ai jamais revu. Il est dans un autre format vidéo et j’ai toujours la volonté de le retrouver et le numériser. Il dure une vingtaine de minutes… Mais on y voit des choses… incroyables. C’est peut-être la seule vidéo de cette époque.

Par David Glaser

suississimo

Episode 1 avec Pat Angeli

Episode 2 avec Steve Ritschard

Episode 3 avec Carole Bottellier

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