La beauté du geste

Dans la vie, on rencontre des passionnés de musique un peu partout, surtout si on est soi-même un mélomane possédé. On est amusé de croiser le chemin de ceux qui semblent avoir jeté leur dévolu (et toutes leurs économies) sur le rock, voyageant à travers le monde pour voir leurs héros sur scène. Mais il y a aussi ceux qui voyagent pour vivre de leur passion, c’est le cas de notre vidéaste spécialiste de la cause musicale pop-jazz-electro… etc. Jean-Baptiste Roumens est connu des artistes suisses depuis une décennie. Ce bon ami, voisin de bureau au département musique de ce qui était encore pour quelques mois la Radio Suisse Romande à la fin des années 2000, a réussi à conjuguer amour pour la musique et parcours professionnel dans un pays qu’il a choisi. Professionnellement, il est l’homme qui se cache derrière des productions radios « L’Histoire de Jack Rose » sur la 1ère en tant que producteur, ainsi que derrière les sélections de chansons au sein de plusieurs émissions de cette même chaîne, en tant que programmateur. En dehors de ses activités pour le média public francophone, il a multiplié les réalisations de clips vidéo car Jean-Baptiste a un parcours d’homme de télévision (il a travaillé à Canal + dans les années 90). Son talent d’homme de sons et d’images s’est aussi exprimé dans des films documentaires artistiques. Jean-Baptiste, Jibey pour les intimes, vient de mettre ses qualités au service des personnes qui vivent des heures difficiles en ce moment, en se montrant généreux, en souhaitant créer du lien à sa façon. Le producteur a eu l’idée de mettre ensemble une danseuse, un groupe de pop suisso-français et deux musiciens classique dans un projet de clip, le tout alors que nous sommes tous en confinement. La magie de la technologie a permis de casser ces distances et le résultat est assez bluffant. Rencontre avec le producteur-réalisateur et marieur Jean-Baptiste Roumens en quelques questions envoyées par e-mail pour lever le voile sur ce lancement d’un clip nommé « Elle Danse » et disponible gratuitement sur la plateforme YouTube LV6A, une vidéo importante qui embellit le monde de la musique suisse, protéiforme, riche, classieux et inventif.

Jean-Baptiste Roumens, commençons par faire les présentations, qui êtes-vous? 
Je suis un réalisateur suisse de nationalité française ! C’est à dire que je suis né en France mais je vis à Lausanne où je travaille depuis plus de 10 ans. J’ai deux grosses passions dans la vie : la musique et la photo. Du coup, j’alterne les projets pour lesquels j’ai eu la chance d’avoir des pointures du monde de la musique devant ma caméra comme Laurent Voulzy, Bastian Baker ou William White et des projets plus « patrimoniaux » avec lesquels j’essaie de rendre hommage à des géants de l’histoire de la photo comme Marcel Imsand ou Sabine Weiss. 

Quelles ont été vos faits d’arme dans le monde de la musique en Suisse? 

Mes vidéos les plus marquantes en terme de succès ont été  le making of du premier clip de Bastian Baker, « Lucky », mais aussi le clip de « For your love » de William White qui a été le plus vu de toute sa carrière et qui a eu de nombreux passages sur des chaînes de TV prestigieuses comme MTV. Je suis également un « pont » entre la Suisse et la France, notamment en convainquant régulièrement mon ami Alex Jaffray, le « monsieur musique » de l’émission « Télématin » sur France 2 de parler d’artistes suisses dans ses chroniques. 

Pourquoi avoir choisi d’associer une danseuse, une violoniste, un violoncelliste et un groupe de pop en français, quel était le but de base?

C’est une longue histoire ! A la base j’ai tourné des plans d’une danseuse, Alice Gratet, évoluant dans une œuvre éphémère du dernier « Lausanne Jardins » pour concourir à un film participatif dont le but est de donner une image de la Suisse à un instant T et qui s’appelle « Switzerländers ». C’est un projet lancé par Michaël Steiner, le réalisateur de très gros succès comme « Grounding » ou « Le merveilleux voyage de Wolkenbruch ». Alors que des milliers de Suisses ont envoyé des milliers d’heures de vidéos nous avons été sélectionnés et le film aurait dû sortir avec nos images au cinéma dans toute la Suisse en ce début de mois de mai 2020. Mais voilà, un méchant virus en a décidé autrement et j’ai voulu reprendre les images à mon compte pour quand même faire quelque chose avec. Comme le duo Carrousel a une chanson qui s’appelle « Elle danse » sur son dernier album, je lui ai demandé l’autorisation de la reprendre pour mon film. Mais comme elle est déjà un peu « vieille » j’ai voulu lui donner une nouvelle jeunesse en demandant à la violoniste Annick Rody de signer l’arrangement pour une « version cordes ». 

Se connaissaient-ils avant? 

Non mais ils ne se connaissent toujours pas aujourd’hui ! Confinement oblige, personne ne s’est rencontré. Annick Rody a enregistré dans le canton de Fribourg, Carrousel dans le Jura, le violoncelliste Jean-François Assy en Belgique et c’est le merveilleux Berni du studio Artifax qui a mixé le tout à Lausanne. Ce qui est incroyable c’est que s’il n’y avait pas eu le coronavirus je n’aurais jamais pu réunir tous ces talents en un temps record car ils sont tous très demandés. 

Jean-Baptiste Roumens par Iuncker Steeve

Pouvez-vous me raconter ce qui vous a amené à associer Annick Rody et Jean-François Assy, se connaissaient-ils?

Là aussi, c’est un pur hasard et une énorme chance. J’avais utilisé pour l’un de mes films la musique de Barbouze de chez Fior, un quatuor à cordes plutôt rock and roll (il a notamment accompagné les Young Gods sur scène) qui a sorti deux albums. Et chaque fois que je croisais une fille du quatuor elle me faisait remarquer que la grande majorité des musiques que j’avais utilisé étaient composées par Annick Rody. Je me suis alors dit que si l’occasion se présentait de travailler avec elle, je n’hésiterais pas un instant. Jean-François Assy, lui, est une légende pour tous les gens qui s’intéressent un peu à la musique actuelle. Il a accompagné sur scène des pointures comme Alain Bashung, Christophe ou Marianne Faithfull. Je l’ai rencontré parce qu’on a une amie en commun, la chanteuse belgo-suisse Stéphanie Blanchoud. C’est elle qui a fait le lien entre moi et Jean-François Assy, et il a tout de suite accepté.

La danse d’Alice Gratet avait-elle été filmée dans un cadre musical, ressemblait-elle à la musique de Carrousel choisie pour cette collaboration?

Non pas du tout et là il faut que je rende hommage à mon monteur, Etienne Matos, qui a fait un boulot de dingue pour tout re-synchroniser. Alice a dansé sur plusieurs musiques qui avaient le même tempo mais pas une en particulier parce que je ne savais pas ce qui serait utilisé pour des questions de droits pour « Switzerländers ».

Comment était l’ambiance dans les échanges pour confectionner cette vidéo ?

Comme personne ne s’est rencontré, il n’y a pas pu avoir de problème d’ego comme c’est trop souvent le cas dans notre métier ! Mais je dois dire qu’avec moi ils ont tous été hyper créatifs, disponibles, souples. C’était un rêve. J’ai même osé demander à Carrousel de changer un mot dans la chanson, ce qu’ils ont fait. Je suis d’ailleurs prêt à payer un verre au premier qui trouvera ce qui a changé par rapport à la chanson originale !

Y aura-t-il une suite à ce projet après le déconfinement?

J’aimerais tellement. On pourrait peut-être imaginer de créer des chorégraphies dans plusieurs lieux de Lausanne, du canton de Vaud ou dans des lieux emblématiques de Suisse. Si la Ville de Lausanne, le canton de Vaud ou Suisse Tourisme y voient un intérêt je suis partant à fond.

Comment a été accueilli le clip sur LV6A et quel est le but de cette plateforme?

Je viens de poster le clip il y a deux jours alors c’est dur à dire mais on fait plus de 150 vues par jours ce qui est plutôt un bon début. LV6A signifie « Helvetia » et le but de cette association est de promouvoir la musique suisse sur des plateformes digitales.

Propos recueillis par David Glaser

Suississimo.com par David Glaser
Première plateforme suisse d’histoires musicales, mais pas que…

Une réflexion sur “La beauté du geste

Laisser un commentaire